Rabbi Ephraïm Enkaoua, le Tsadik de Tolède devenu le "Rab de Tlemcen"
Dans l'histoire du judaïsme algérien, Rabbi Ephraïm Enkaoua zatsal se distingue comme une figure lumineuse. Sa tombe à Tlemcen témoigne de la mémoire d'un homme dont l'influence spirituelle et intellectuelle a profondément marqué sa communauté, et les Juifs séfarades en général. Surnommé de son vivant "la lumière d'Israël", il incarnait une sagesse et une érudition qui lui valurent un respect immense. Plusieurs siècles après sa disparition, son héritage continue de fasciner et de nous inspirer. Connu sous diverses appellations - Alnaqua, Al-Nakava, Ankava, Ankoa - il était alors simplement appelé Le "Rab de Tlemcen". Sa Hiloula, célébrée le 1er Kislev, commémore un destin extraordinaire traversant une période éssentielle de l'histoire juive.
Rabbi Ephraïm Enkaoua vit le jour en 1359 à Tolède, alors joyau du judaïsme médiéval espagnol. Fils de Rabbi Israël, Grand Rabbin de la ville, Ephraïm reçut dès son enfance un enseignement d'exception. Des maîtres réputés le formèrent à l’étude de la Torah, et il fut plus tard envoyé étudier la médecine à l'Université de Palencia, en Nouvelle Castille. Son parcours, mêlant miracles et drames, témoigne d'une trajectoire hors du commun…
Les persécutions contre les Juifs d’Espagne
Après la Reconquista*, l'Espagne s'enfonça dans une période sombre de violences antisémites, orchestrées par un clergé particulièrement virulent. En Castille, les Juifs étaient sommés de choisir entre la conversion et l'exil. En 1390, l'ordre de démolir les synagogues fut promulgué, déclenchant une vague de persécutions meurtrières qui, en quelques mois, causa le massacre de cinq mille Juifs.
Au nombre des victimes, Rabbi Israël, père du Rab, fut arrêté, jugé puis brûlé vif, tenant précieusement un Sefer Torah contre sa poitrine. Son fils Salomon connut le même destin de martyr peu après. Soixante-dix communautés juives furent alors totalement éradiquées.
Pour échapper à ces persécutions, Rabbi Ephraïm, comme tant d'autres, quitta l'Espagne et trouva refuge au Maroc. Accueilli d'abord par la communauté de Marrakech, il gagna deux ans plus tard Hanaïm, port stratégique sur la route de l'or et des esclaves, avant de poursuivre son chemin vers Tlemcen.
L'arrivée miraculeuse de Rabbi Ephraïm Enkaoua
Un épisode extraordinaire marque l'histoire de Rabbi Ephraïm. Lors de ce périlleux voyage pour fuir l’Espagne, à la veille du Chabbat, il choisit de rester sur place, fidèle à sa foi, alors que sa caravane poursuivait sa route. Abandonné dans une contrée hostile, peuplée de brigands et de bêtes sauvages, il se retrouva face à un lion surgissant brusquement.
Revêtu de son Talith, le Rabbin récita le Psaume 91:13 : « Sur le lion et la vipère tu marcheras, tu fouleras le lionceau et le serpent ». Étonnamment, la bête féroce s'approcha, comme subjuguée, et se coucha paisiblement à ses pieds. Tout au long du Chabbat, le lion veilla sur lui, le protégeant des dangers environnants.
À la fin du Chabbat, le fauve tenait entre ses mâchoires un serpent dont les extrémités formaient un harnais. Rabbi Enkaoua comprit alors le signe divin : il enfourcha le lion qui le conduisit jusqu'à Tlemcen. Le récit de cette arrivée miraculeuse se répandit rapidement, amplifiant la renommée du Tsadik qui allait bientôt devenir le Rab de Tlemcen.
Rabbi Ephraïm Enkaoua à Tlemcen
À Tlemcen, les Juifs vivaient jusqu'alors relégués dans un quartier isolé et périlleux. Tout changea le jour où le sultan Abou Tachfine, dont la fille était gravement malade, fit appel à Rabbi Enkaoua, déjà réputé pour ses talents médicaux. Après avoir miraculeusement guéri la princesse, le Rabbin obtint du souverain l'autorisation pour sa communauté de s'installer dans le centre de la ville, à l'intérieur des murailles. Un nouveau quartier, "El Merja" (le lac), accueillit alors les Juifs en toute sécurité.
Dès lors, Rabbi Enkaoua se consacra au développement communautaire. Il fit construire une grande synagogue qui porte encore son nom aujourd'hui et qui demeura le cœur de la vie juive de Tlemcen jusqu'à l'indépendance de l'Algérie en 1962. Il fonda également des maisons d'étude, des écoles rabbiniques, des écoles élémentaires, des bains rituels et des fours pour les matsots.
Le Beth-Din, tribunal rabbinique créé par le Rab, devint une institution majeure, gérant les affaires civiles et pénales de Tlemcen et des communautés environnantes. Des liens étroits se tissèrent avec d'autres communautés juives, notamment celle d'Alger où officiaient le Ribach (Rav Yts’hak bar Chechet) et le Rachbats (Rav Chimon Ben Tsema’h Douran), lui aussi rabbin et médecin. Un lien familial scella définitivement cette alliance lorsque Zéhrah Ben Shlomo Douran, petit-fils du Rachbats, épousa la petite-fille du Rab de Tlemcen.
Durant cette période, Rabbi Ephraïm Enkaoua rédigea un traité philosophique, "Chaar Kévod Hachem", dans la tradition de Maïmonide. Son testament spirituel résonne encore aujourd'hui : "Je vous laisse deux sources : la source d'eau pour fortifier votre corps et la source de la Torah qui symbolise la vie éternelle. La source d'eau offerte par la volonté de D... et la source de la Torah qui demande la bonne volonté de chacun de nous".
La Hiloula du Rab de Tlemcen
Rabbi Ephraïm Enkaoua fut une figure exceptionnelle en Algérie, respecté par tous. Médecin du roi, il jouissait de l'estime des autorités et de la population de Tlemcen, tant juive que musulmane. Le 1er Kislev 5203 (13 novembre 1442), il quitta ce monde et fut enterré près du vieux cimetière juif, sur la route de Hennaya, dans un espace partagé avec sa famille.
Sa renommée était telle que sa tombe devint un lieu de pèlerinage important en Afrique du Nord, attirant des foules jusqu'aux indépendances du Maroc, de la Tunisie et de l'Algérie. À proximité reposait la fille du sultan, miraculeusement guérie par ses soins.
Chaque année, sa Hiloula se célébrait conjointement avec celle de Rabbi Chimon Bar Yo'hai, le trente-troisième jour de l'Omer. Ces festivités transformaient Tlemcen pendant près d'une semaine, avec des concerts orientaux, des festins, des prières et des rassemblements où les pèlerins venaient chercher guérison, fertilité, mariage et réussite.
Même après le départ de la communauté juive et l'indépendance de l'Algérie, le tombeau de Rabbi Enkaoua demeure un symbole vivant de sainteté et de miracles, transcendant les frontières communautaires et temporelles. On peut y lire en hébreu l’épitaphe suivante : "Ici repose celui qui fut notre orgueil, notre couronne, la lumière d'Israël, notre chef et maître, versé dans les choses divines, homme miraculeux, le Grand Rabbin Ephraïm Enkaoua. Que son mérite nous protège".
*La Reconquista est le long processus historique (du 8e au 15e siècle) durant lequel les royaumes chrétiens de la péninsule ibérique ont progressivement reconquis les territoires occupés par les royaumes musulmans (Al-Andalus), aboutissant à la chute de Grenade en 1492 et à l'unification de l'Espagne sous la couronne catholique.
Tsidkat-Eliaou marquera ce jour par une journée d’étude au Kollel Chaaré Nissim situé dans la synagogue Baba Salé - Chaaré Nissim de Jérusalem.
À l'occasion de la Hiloula de ce grand Tsadik, Tsidkat-Eliaou vous invite à allumer une veilleuse, à sa sainte mémoire, à lire quelques psaumes de Téhilim (si possible ) et à prier pour le Am Israël !
Puis, récitez la formule ci-après :
Zékhouto taguen alénou véal kol Israël, Amen.
Le Tsadik priera pour vous.
Vous pouvez également associer vos prières à la noble et grande mitsva de la Tsédaka et nos Rabbanim vous bénirons dans la synagogue Baba Salé - Chaaré Nissim de Jérusalem.
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Prochaines dates de la Hiloula de Rabbi Ephraïm Enkaoua zatsal, le "Rab de Tlemcan"
2024 ► 2 décembre
2025 ► 21 novembre
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Paru au Journal Officiel du 01/1990
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